&. Ren Okazaki - Une délinquante ? [NO FINISH]

Allemagne; Mur de Berlin. 14 Novembre 2000.

Elle marchait. Il marchait. Main dans la main. Ils traînaient des pieds. Tous seuls vers ce mur détruit, ils erraient. C’était la fin d’une journée d’automne. Il faisait froid. Le vent soufflait ford. Les nuages grisâtres annonçaient de la pluie. Tout le monde était chez eux. Deux enfants, marchant aveuglément vers une destination inconnue. Ils étaient là, tous seuls. Pour longtemps. La fille s’arrêta et pointa du doigt un banc. Elle avait mal aux pieds et son regard suppliait le garçon de faire une pause. Ce dernier sourit. Ils s’installèrent sur l’objet en bois, et regardèrent le ciel.

« Kyo-kun, on ne va pas rentrer à la maison, hein ? »

« Bien sûr que non, Raven-chan. » lui répondit-il avec un sourire rassurant.

La petite fille se blottit dans les bras de son frère, s’endormit un instant, engourdie par le froid de la saison. Ses lèvres gercées, le garçon les contemplait. Il enlaça le corps frêle de sa sœur pour la réchauffer et il s’endormit aussi.

Quelques heures plus tard, un bruit strident les fit se réveiller en sursaut. Le garçon connaissait bien ce son. Cette alerte. Il bougea sa sœur, encore les yeux brouillés de sommeil et ils se mirent à courir. Vite, plus vite. Ils avaient neuf ans, ils fuyaient. Qui ? Leur famille. Leur cœur leur faisait mal, sous l’effort si intense. Ils n’étaient que des enfants. Nous étions en pleine nuit, les deux fuyards se sont retrouvés sur l’une des avenues principales. Raven, la petite fille, sous le coup de la panique, avait lâché la main de son frère et un adulte pressé l’envoya valser sur la route, au moment où une voiture arrivait à toute allure. Elle cria. Sa voix stridente retentit, puis le bruit sourd de l’impact, le crissement des pneus de l’automobile. Des murmures de panique. Un corps ensanglanté. Un proche pleurant. Des policiers gênés. Désespoir. Amertume. Colère.

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Allemagne; Un hôpital de Berlin. 16 Novembre 2000.

Voilà deux jours que la petite Raven était dans le coma. Un sommeil profond. Peu de chance de se réveiller. Peu d’espoir qu’elle survive. Kyo, le frère, en était devenu fou. La justice l’avait rapatrié chez lui. Dans sa famille… Des médecins, tous réunis sur le cas de la cadette de la famille des Franz, cherchaient une solution. Mais ne voyait pas. Mais dans la tête de l’enfant, on pouvait y voir sa vie défiler à vitesse grand V.

In front of her eyes.

• Ma vue était brouillée. Je ne voyais rien. J’étendais mes petits membres. Je poussais de petits cris. J’entendais des bruits abstraits. Ça faisait mal aux oreilles, au début. Et il y avait trop de lumière. Cet environnement, n’était pas le même qu’il y a quelques heures. Il y a… tellement d’espace. Il n’y a pas ce liquide dans lequel je baignais. Et je ne sens plus sa présence si proche de moi. Serais-je… née ?

• Je pouvais les voir désormais. Me sourire et me caresser. Je regardais ce nouveau monde avec curiosité. Mes grands yeux bleus qui regardaient tout ce qu’il y avait autour de moi avec étonnement. J’ai bougé ma jambe pour frôler celle de mon frère qui lui somnolait à côté de moi. Je pouvais désormais de nouveau sentir sa présence près de moi. Mais nous n’étions plus si liés que ça. C’était différent. Ça donnait une impression si bizarre. Je ne pouvais pas parler encore. Je ne pouvais que pousser des petits cris incompréhensibles. Seules les expressions que j’arborais sur mon visage de nouveau né laissaient comprendre certaines choses. Et encore, c’était tellement limité. Fatiguée, j’ai fermé les yeux et me suis endormie. J’allais vivre désormais. Vivre…

• Je marchais désormais. A quatre pattes, certes, mais je bougeais librement dans ma maison. Je savais dire papa, maman et Kyo. J’étais une vraie petite boule d’énergie comparée à mon frère qui lui était plutôt sage. Je bougeais sans cesse. Voulant découvrir toutes les choses de ce monde, je n’avais pas peur de tester. Je m’étais déjà brûlée avec le feu, et j’avais trouvé ça fascinant. J’aimais le grand air et aller sur la balançoire. Je voyais un visage heureux de la part de mes parents. Un visage épanoui…

• Je rentrais à l’école. Maternelle. Je me faisais vite des amis. Mon frère était timide, je devais sans cesse le booster pour qu’il fasse des rencontres. A chaque fois, il était tellement gêné qu’il rougissait fortement. Je rigolais. Ce monde est drôle. Ce monde est bizarre. Il est tout simplement génial. Je me disputais parfois, je n’aimais pas vraiment ça. J’étais très dévergondée, ça m’a value plusieurs punitions. Sinon, je menais une vie de petite fille totalement normale. ~

• Quand je suis rentrée à l’école primaire, j’étais déjà un peu trop sûre de moi et je me laissais aller. Mes parents y ont très vite remédié en me bougeant un peu. Mais je devenais de plus en plus indépendante, je devenais si… étrange. Mon comportement devint si vite une calamité. Je devenais vulgaire, désobéissante. Je me demandais pourquoi j’agissais comme ça devant les autres. Peut-être pour être aimée.. ? Mais ce n’était pas comme ça qu’il fallait que je m’y prenne. J’en parlais avec mon frère, le plus posé et le plus réfléchi de nous deux. Puis au fil des années, j’ai de nouveau changé, je me suis assagie pour redevenir à peu près comme avant.

• Je me souviens de nos huit ans, à Kyo et moi, ce fut un incroyable anniversaire qui fut garni par un choc terrible pour nous. Notre père mourut dans un attentat en plein Berlin. Il était banquier. Un braquage. Il avait voulu sauver tous ses employés. Il les a sauvés mais au prix de sa vie. Ç’avait profondément touchée notre mère qui perdit toutes raisons de vivre. Bien que les assassins aient été incarcérés et attribués d’une peine à perpétuité, cela ne suffisait pas pour apaiser la souffrance et la tristesse de notre génitrice. Elle ne faisait plus rien de ses journées. Nous étions tristes pour elle, nous ses enfants. On ne comprenait pas encore très bien pourquoi elle était dans cet état. Pour nous, la mort d’un proche, ça laissait un grand vide. Mais pour ma mère, perdre l’être qui lui était le plus cher au monde, c’était un drame. La fin du monde.

• Puis nous nous sommes vite retrouvés avec un beau-père. Un riche bijoutier Suisse venu s’installer en Allemagne. Parce qu’on voulait faire plaisir à notre mère, alors on a tenté d’accepter la présence de cette homme et à essayer de l’intégrer dans notre famille. Mais nous n’aimions pas cet homme. Notre mère avait changé. Elle devenait si égoïste, hautaine et sournoise. Et vint le temps où elle frappait mon frère sous l’effet de l’alcool. Elle lui remettait toutes les fautes du monde. Et moi je regardais, impuissante. Maman le faisait quand lui n’était pas là. A l’école, Kyo disait tout le temps « Je suis tombé dans les escaliers ce matin, je ne suis pas très doué. », alors que c’était notre propre mère qui le maltraitait. Ça me rendait malade. Je n’en pouvais plus de cette atmosphère. Je voulais partir. Nous voulions partir. Loin de cet endroit. Le plus loin possible.

• Et la nuit du 13 Novembre 2000, un an après de martyre, nous nous sommes échappés alors qu’ils tous les deux n’étaient pas là. Nous avons été jusqu’au mur de Berlin et nous l’avons longé. Tout le long. Nous savions où notre mère cachait ses économies. Nous les lui avions prises. On avait marché. Longtemps. Des personnes âgées nous avaient aidés, nous avaient offerts l’hospitalité. C’était trop gentil de leur part. Il y en a qui se sont attachés à nous.
Au petit matin, nous avions entendu à la radio qu’on nous recherchait. Je m’étais coupée les cheveux et Kyo se les était teints en noir. Nous faisions en sorte de ne pas tomber dans les endroits où il y avait affiche et télé dans les bars, mais c’était difficile. Nous avons continué de longé ce mur. C’était dangereux, mais nous étions déjà pris dans le jeu, c’était trop tard.

• Le 14 Novembre de cette même année, entre autre le lendemain, vers quatorze heures, on était passés dans un quartier où policiers demandaient aux civils s’ils ne nous avaient pas vus. En général, c’était péjoratif, vu que nous avions changé de tête. Mais il suffisait que le moindre détail les fassent douter pour que nous soyons placés en garde à vue. Et c’est cette nuit de ce jour-là, que tout arriva. Je m’étais endormie dans les bras de mon frère, puis les sirènes nous ont réveillés. Kyo m’a secouée, sortie de ma léthargie et nous nous sommes enfuis, sachant pertinemment que ce bruit strident était pour nous. Et quand nous sommes arrivés sur cette grande avenue, un homme de la quarantaine nous sépara, moi et mon frère. Il était tellement pressé qu’il m’a poussée sur la chaussée. Une voiture arrivait. Je voyais les phares se rapprocher. J’avais l’impression que le temps avait ralenti. J’entendais mon cœur battre à mes tempes. C’était horrible. Je tombais si doucement. Trop lentement. Je me suis entendue pousser un cri strident. Puis j’ai entendu le crissement des pneus. Toujours au ralenti. Des gens crier. Puis tout alla subitement plus vite. Je n’eus pas le temps de voir venir le choc, que je me retrouvai déjà à terre. Mes côtes me faisaient mal. Mon cœur me faisait mal. Je respirais avec difficulté. Tout se brouillait déjà. C’est comme quand je suis née, mais en chemin inverse. Je ne pouvais plus bouger mes petits membres, je me sentais baigner dans un liquide.
Et je vis sa tête. Mon frère chéri. Qui pleurait. Je me posais cette question « Pourquoi est-ce que tu pleures ? ». Avec les forces qui me restaient je lui avais souri, et j’avais pu sentir ses larmes s’écraser sur mes joues froides. En dernier, tout devint noir. Et je ne pus entendre qu’une dernière phrase : « ELLE EST MORTE !!! ». Je suis… morte ?

In front of her eyes.

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Allemagne; Un hôpital de Berlin; 4 Décembre 2000.

Cela faisait bientôt trois semaines que Raven était dans le coma. Et elle n’avait pas bougé d’un cil. Les docteurs commençaient à ne plus croire en son réveil, mais veillait tout de même sur elle. Son frère jumeau avait fait un scandale pour pouvoir rester tout le temps au côté de sa sœur, et il avait réussi. Celui qui s’occupait de la petite comprenait parfaitement le désir de Kyo. Ils étaient jumeaux, après tout. Quand ce dernier vint voir où en était l’état de sa sœur adorée, il remarqua que sur le cardiogramme, le pouls de sa sœur allait de plus en plus vite. Que ses mains étaient crispées et qu’elle suait. Pris de panique, il appela les infirmières. Mais le temps qu’ils arrivent tous, ils découvrirent une scène…

Raven s’était réveillée. En sursaut. Prise d’une montée de tension importante, elle bougeait dans tous les sens. Ses veines ressortaient. Ses exorbités regardaient droits devant avec peur. Kyo tentait de la plaquer sur son lit en la prenant par les poignets mais il s’avéra que sa sœur eut un peu plus de force que lui. Ils vinrent tous l’aider et le docteur lui injecta un calmant. Elle repartit vite dans un petit sommeil.

« Elle est sortie de son coma, il lui faut beaucoup de repos maintenant. »

Un peu plus que soulagé, Kyo reprit ses études. Quant à la rescapée, elle se remettait tout doucement de son accident. Mais son rétablissement fut joyeux que temporairement. Car là fut le moment où tout devint plus compliquer.

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Allemagne; Centre de rééducation; 9 Mars 2001.

Des mois plus tard, on fit appeler Kyo au centre de rééducation où avait été transférée Raven. Pendant ces quatre mois, le jeune homme avait été interdit de voir sa sœur. La raison ? Pour son bien, disaient-ils. Et le môme les croyait. Alors il a patienté. Quand il fut appeler, il en tremblait de joie. Pouvoir enfin serrer sa tendre sœur dans ses bras, lui faire pleins de bisous, il en avait rêvé durant ces longs mois d’attente. Mais ce qu’il ne savait pas, c’est que cette visite allait lui briser le cœur.

Au centre, Raven attendait dans sa chambre, jouant avec une infirmière à la poupée. Elle avait subi des chimiothérapies et n’avait donc pas beaucoup de cheveux. Mais elle souriait. Quand son frangin arriva dans la pièce, accompagné par les docteurs, la petite fille âgée de neuf ans se leva et courut vers lui. Ce dernier, à son approche, commença à tendre les bras. Les autres personnes semblaient retenir leur souffle, puis la petite lâcha d’une traite, avec un grand sourire :

« Hé toi, tu veux pas venir jouer avec moi ? ♫ »

Kyo déglutit. Celui qui suivait la jeune fille toussota. Le garçon, accroupit devant cette petite fille qui était sa sœur, ne comprenait pas et restait stoïque. Il était déstabilisé, il ne se repérait plus. Il se disait intérieurement : « Ce ne peut pas être elle. Raven m’aurait reconnu ! ».
Le médecin traitant embarqua le garçon, encore sous le choc. Arrivés dans le bureau du scientifique, ce dernier lui expliqua tout doucement, en articulant bien :

« Nous savions… qu’elle avait perdu la mémoire. »

Il laissa le temps à Kyo de bien capter ce qu’il lui disait. Ses yeux étaient vides.

« Mais nous pensions que si elle te voyait, elle se souviendrait de toi, vu que tu es son frère jumeau… » reprit le docteur d’une voix plus posée.

A cette phrase, Kyo déglutit. L’homme en face de lui fronça les sourcils. Il voulu rajouter quelque chose mais n’en eut pas le temps. Le jeune homme en face de lui prit les devant :

« Ça suffit ! » hurla-t-il. « Cette fille n’est pas ma sœur ! Elle m’aurait reconnu ! Je ne la connais pas ! »

Dit de cette manière, la docteur ne sut quoi dire. Kyo termina cette entrevue en disant qu’ils pouvaient bien faire ce qu’ils voulaient d’elle, lui n’en aurait rien à faire.

Les jumeaux ne se virent plus jamais. Ils finirent leur primaire tranquillement. Raven fut adoptée par un jeune couple qui ne pouvait avoir d’enfant. Mais ils étaient sournois. Et au collège, comme Ren, ainsi fut son nouveau prénom, devenait comme elle est actuellement, l’entente ne se faisait pas bien sentir. Elle alla ainsi de famille en famille, provoquant toujours la pagaille. Et à ses seize ans, alors qu’elle venait d’entrer en première au lycée, elle se retrouva nez à nez avec son frère jumeau… Kyo. Cela faisait tellement longtemps…